Ce nouveau restaurant respecte les enjeux de son nom bizarre. Siprès évoque à la fois l’arbre méditerranéen, le cyprès, et également un désir de convivialité. Car Siprès se lit aussi « si près ».
La cuisine est effectivement héliotrope. Orientée au sud, comme disent les agents immobiliers avec un sourire plein de dents. L’aubergine laquée, accompagnée de harissa et de miel, sur une base onctueuse de yaourt au tahini (de la crème de sésame) et feuilles d’épinard en guise de parasol, piquée de graines de grenade et de pépites de riz soufflé, gentiment percutée de poudre de persil , illustre parfaitement l’esprit de la maison et l’influence marquante de Yottam Ottolenghi sur un pan de la cuisine contemporaine.

Le chef Londonien, originaire de Jérusalem et auteur à succès, a propulsé la cuisine moyen-orientale dans le grand jeu gastronomique planétaire. La cuisine de rue immédiate, soulevée par un vent créatif et la multiplication de saveurs peut désormais se retrouver invitée dans des lieux nappés où il faut réserver plusieurs semaines à l’avance. Mais ici nous sommes plutôt dans un bistrot, simple mais chic (vaisselle du céramiste Jars). Le plat, totalement végétal, englobe une large palette de sensations : le frais, le chaud, le juteux, le croquant, le crispy, le fondant, le moelleux, l’ardence et le sirupeux, le sucré, le salé, des impressions d’Israël et de Liban.

Cuisine du Sud, du Liban à l’Italie

Là, où pourrait naître le chaos et la pelote de saveurs, tout est équilibré et fluide. Bref, c’est un bon plat. Mais le Sud est vaste, comme disent les lapons. En entrée, fredonnait aussi un air de sarà perché ti amo : une réinterprétation du vitello tonnato, lamelles de veau escamotées au profit d’un lit de tomates. Là encore le simple ne s’exonère pas du détail : rien que la grosse câpre du dessus était excellente.

Vous n’êtes pas obligé de vous enduire systématiquement de crème solaire, la carte comportait aussi un excellent pâté croûte-maison et une pluma de porc, pommes de terre grenaille et feuilles de blettes. A l’heure où les automobiles visent la conduite autonome, les chefs ont de plus en plus tendance à piloter à deux. Alexis (Trimbour) passé au grand Véfour démarre sur le salé et Alexis (Ostiguian), passé chez Epona, embraye sur le sucré. Voilà pourquoi les desserts, délicieux, ne sont pas dehors en train de faire du stop.

Siprès, 2 place du Prado, Lyon 7e. 04 87 78 43 02. Du lundi au vendredi le midi (formule 19,50 €, menu 24,50€), du mardi au vendredi le soir (plats à partager entre 9 et 21 euros (onglet de bœuf, ail noir, purée au siphon). Terrasse.