C’est le grand orfèvre de l’exercice de style au cinéma, grand fanatique des doubles et des mises en abîme. En s’amusant de l’esthétique la plus kitsch des années 80, Brian De Palma a inventé à lui tout seul le cinéma du XXIe siècle : Mission impossible (1996) avec Tom Cruise était le premier thriller hollywoodien composé autour des écrans multiples, bien avant le téléphone portable et le très sous-estimé Redacted en 2007 mettait en scène des scènes de guerre de propagande ou des fake news à partir de vidéos tirées du web.

Scarface de Brian De Palma avec Al Pacino.

Tous les sujets brûlants sont dans son œuvre. Avec le remake de Scarface avec Al Pacino dans les années 80, il signait un film culte, dynamitant le film hollywoodien de l’intérieur : ultra-violence, sang, sexe, tyrannie familiale, tabou brisé de l’inceste, la grandiloquence est partout, avec en prime les nappes synthétiques de Giorgio Moroder sur le regard d’Al Pacino annonçant ses crises de nerfs…

Blow Out, le plus beau film du monde ?

La circulation de l”argent et de la drogue inspireront le Casino de Scorsese, alors que le goût pour le kitsch et les scènes de comédie à l’intérieur d’un film de gangsters annonçaient déjà Tarantino. De Palma est le grand pionnier du cinéma d’aujourd’hui. C’est aussi le grand héritier d’Hitchcock avec ce qui reste peut-être son plus beau chef-d’oeuvre : Blow Out. John Travolta au faîte de sa beauté y campe un ingénieur du son de film d’horreur en plein fiasco sexuel. Comme toujours, Brian De Palma fait illusion, manipule le faux et le vrai mais surtout la puissance du fantasme, jusqu’à un feu d’artifice inoubliable pour l’amour de Nancy Allen, détournant le thriller paranoïaque vers un mélo grandiose.

Redacted, un des films les plus sous-estimés de Brian De Palma.

Brian De Palma, noir, c’est noir

Etonnamment, après le succès des Incorruptibles, ses seuls « échecs » viendront du film noir avec Snake Eyes et surtout Le Dahlia noir, adapté de James Ellroy, qu’on peut largement réévaluer aujourd’hui. Mais en plus de la grande rétrospective que lui consacre l’Institut Lumière, De Palma vient à Lyon pour un polar à deux mains, Les Serpents sont-ils nécessaires ?, chez Rivages, écrit avec sa femme, Susan Lehman. Le titre, piquant, est tiré d’un de ses films préférés de Preston Sturges, The Lady Eve. Même en littérature, il ne peut se passer ni des femmes, ni de cinéma.

Rétrospective Brian De Palma à l’Institut Lumière, Lyon 8e, jusqu’au 23 avril.

Rencontre avec Brian De Palma suivie de la projection de Phantom of paradise, vendredi 29 mars à l’Institut Lumière dans le cadre de Quais du polar.

Soirée spéciale Brian De Palma Blow out + Body Double animée par Samuel Blumenfeld. Mercredi 27 mars à partir de 19h à l’Institut Lumière.