Auteur à succès au théâtre, Alexis Michalik revient au cinéma avec Une Histoire d’amour, l’adaptation de sa propre pièce qui marquait sa première incursion dans le genre du mélo. Sans perdre son sens de la narration. Entretien.

Une histoire d’amour est un foisonnement de plusieurs histoires d’amour. C’était déjà le cas histoires dans votre pièce ou les avez-vous particulièrement développées en l’adaptant Pour le cinéma ?

Alexis Michalik : “ Non, c’est la même histoire, mais racontée différemment. Notamment à travers la première histoire d’amour entre les deux femmes, qui est plus courte, ou la séquence finale dansée qui n’était pas dans la pièce. Mais toutes ces histoires d’amour étaient traitées dans la pièce et j’ai tenu à garder l’ensemble de la troupe de théâtre au cinéma. Amener ces comédiennes qui avaient créé la pièce avec moi et qui n’étaient pas identifiées au cinéma faisait partie du challenge. A commencer par Juliette et Marica dans les rôles principaux (Juliette Delacroix et Marie-Camille Soyer, ndlr).

C’est pour ça qu’on a créé notre boîte de production Acmé films avant d’aller chercher des partenaires. Dans l’adaptation, j’ai surtout ajouté des décors, et retiré des dialogues. Au cinéma, on montre, au théâtre on raconte. Je voulais avant tout que le film soit un véritable objet de cinéma et qu’à aucun moment on ne puisse voir de la théâtralité.

« Je ne voulais pas faire un mélo plombant, mais rende ce que vivent les personnages encore plus vital. »

ALEXIS MICHALIK
Alexis Michalik en écrivain alcoolique dans Une Histoire d’amour.

Une histoire d’amour marque aussi une rupture de ton dans votre univers : il s’agit avant tout d’un mélo…

Oui, je l’ai écrit en 2019 quand je sortais d’une séparation donc j’étais à l’endroit idéal pour le faire ! Mais je ne voulais surtout pas faire un mélo plombant même si le film parle de sujets très graves comme le cancer ou le deuil. Je voulais qu’on garde toujours une forme de distance par rapport aux situations terribles que les personnages ont à traverser. Je voulais que le film rende les choses encore plus vitales, pas qu’il nous ôte tout espoir. C’est une ode à vivre les choses vite avant qu’il ne soit trop tard. C’est un film de pulsion de vie plutôt que de négativité.

L’art de la narration est une des vos grandes qualités. Est-ce plus difficile au cinéma ?

Pas au moment de l’écriture. On me dit souvent que mes pièces sont très cinématographiques ! Et s’il y a plusieurs histoires d’amour dans le film, elles restent assez linéaires. Je pense que le film se suit plus facilement que certaines de mes pièces un peu plus sinueuses comme Intra Muros

« J’ai essayé de faire un film d’auteur populaire, à la fois modeste par le budget, intimiste par le sujet, mais sans avoir peur des émotions. »

Alexis Michalik

Vous parvenez aussi à raconter plusieurs histoires sur plusieurs années en moins d’1h30…

Je ne l’avais pas prémédité. J’ai d’abord développé beaucoup plus de situations que je n’ai finalement pas gardées. Les premières versions du montage faisaient bien 20 minutes de plus. J’ai passé quasiment un an au montage, et je coupais de plus en plus. En commençant à le montrer et en dialoguant, j’élaguais de plus en plus. Au finale, le film fait effectivement un peu moins d’1h30 avec le générique. Ce qui est fou, c’est que c’est la durée exacte de la pièce, alors que ce ne sont pas les mêmes scènes !

C’est en cherchant le rythme et en trouvant le sens au fur et à mesure avec ce souci de la narration dont vous parliez que j’ai finalement abouti à la même durée sans le chercher…J’ai essayé d’en faire un film d’auteur populaire, à la fois modeste par le budget, intimiste par le sujet, mais sans avoir peur des émotions et de faire avancer la narration. Ce sont sans doute des ficelles qui ne sont pas forcément celles du cinéma d’auteur, plutôt celles du cinéma américain, même s’il s’agit d’un film très personnel. Je voulais faire un mélo qui s’adresse à tout le monde.

Vous pourriez écrire un scénario natif, directement pour le cinéma, qui ne soit pas une adaptation de vos propres pièces…

Oui, sans doute le prochain ! (rires) Le cinéma est beaucoup plus contraignant. On peut travailler pendant un an ou plus sur un projet et finalement ne pas le voir se faire. Au théâtre, ce n’est pas le cas. J’ai la chance de pouvoir raconter les histoires que je veux avec les acteurs que je veux, sans nécessairement qu’ils soient connus. C’est un luxe inouï ! Je n’ai pas cette même liberté au cinéma, aussi parce que le cinéma coûte beaucoup plus cher.

Pour Edmond, j’avais envie d’en faire un film avant même qu’il ne soit une pièce, mais je n’ai pu faire le film qu’après. De la même façon, je n’avais pas prévu de faire un film d’Une histoire d’amour. C’est le retour du public en voyant la pièce, et surtout le confinement qui a interrompu la tournée qui m’ont poussé à l’adapter au cinéma. Je ne suis pas un hyper-actif, je ne joue pas tous les soirs sur scène et j’aime beaucoup les vacances avec mes amis ! (rires) C’est d’ailleurs comme ça qu’était né Une Histoire d’amour.

Votre prochaine pièce ?

J’ai fini de l’écrire. Je vais encore changer de genre. Avec sans doute un ton davantage politique…”


Une Histoire d’amour de et avec Alexis Michalik. Sortie le 12 avril.

Une Histoire d’Amour – Alexis Michalik