Il joue un comédien à succès, un peu « lâche« , « chieur » et même « minable‘, obligé de faire des selfies dès sa première séance de massage dans la thalasso de luxe où il est parti se reposer. On aime bien Guillaume Canet, mais autant dire qu’on avait plutôt envie de se pendre que d’aller voir Hors-Saison. Se pendre, comme Vincent Lindon dans à peu près tous les films qu’il a faits avec Stéphane Brizé, bourru, déprimé, licencié et même… immolé (dans l’horrible En guerre).

Guillaume Canet, drôle et tel qu’en lui-même

Guillaume Canet et Alba Rohrwacher, Hors-Saison.

Et pourtant dans sa solitude de thalasso, le personnage de Canet a tout de suite un humour qu’on ne connaissait pas chez Brizé, en quelques incisions de satire sourde très bien senties sur la dérision de la notoriété. De retour à la veine sentimentale, Brizé a soigné son scénario (co-écrit avec Marie Drucker). D’abord pour capter des moments très drôles de la solitude choyée de l’acteur dans les chambres d’hôtel (le jazz, la zumba et la machine à café). Ensuite pour installer une histoire d’amour à combustion lente, incomplète mais solaire, faisant renaître en plusieurs étapes une ancienne liaison avec une femme peu sûre d’elle, quidam aux sentiments enfouis.

Hors-Saison, le meilleur film de Stéphane Brizé

Alba Rohrwacher, liaison passagère.

Faux film simple, Hors-Saison fait la place aux sentiments qu’elle n’a peut-être pas osés, et que lui ne peut plus laisser voir sous le masque social de la notoriété. D’où la scène très drôle sur la plage avec le prof de sport philosophant sur l’intérieur et l’extérieur.

Vieilli mais pas usé, Guillaume Canet est remarquable de lâcher-prise de bout en bout, aussi juste dans sa solitude inavouée que saisi par les émotions passagères. La scène des oiseaux à l’Ehpad, puis la scène de bal, très chaste, sont splendides. Jusqu’à ce que l’amour, apparemment sans suite, s’ensuive, les rares ébats s’évanouissant dans le silence des gestes.

La petite rengaine musicale de Vincent Delerm n’a plus qu’à lover ce beau film d’amours tues à la Claude Sautet. Avec le même équilibre entre aspiration romanesque et réalisme, des paysages maritimes superbes aux personnages secondaires (Lucette, 78 ans). Laisser de côté le « glauque » de son cinéma auquel il fait allusion à la fin de son film a fait du bien à Stéphane Brizé. A deux ou trois afféteries près, Hors-Saison est un beau film sur l’indécision d’une liaison.

Hors-Saison de Stéphane Brizé (Fr, 1h55) avec Guillaume Canet, Alba Rohrwacher, Sharif Andoura, Lucette Beudin et la voix de Marie Drucker… Sortie le 20 mars.