[mis à jour le 16/02]

Après son remake grandiose de West Side Story, grand film sous-estimé, Steven Spielberg continue son trip cinéphile et revisite ses souvenirs de jeunesse dans The Fabelmans, raflant déjà 2 Golden Globes. Entre introspection douloureuse du divorce de ses parents et déclaration d’amour au septième art, il démontre une nouvelle fois son talent de conteur hors-pair dans un récit d’apprentissage bouleversant.

Le film s’ouvre sur la première sortie au cinéma du petit Sam, alter ego filmique du réalisateur. Son père, l’ingénieur informatique Burt Fabelman, lui explique le principe de la persistance rétinienne tandis que Mitzi, la mère du garçon aux penchants artistiques lui dit que « les films sont comme des rêves que tu n’oublies jamais ». Magnifiquement interprétés par Paul Dano et Michelle Williams, ces deux figures représentent une formidable dichotomie entre art et science, deux côtés d’un même cerveau qui sont à l’origine de l’identité du réalisateur.

Paul Dano e Michelle Williams en parents du jeune Steven Spielberg au cinéma dans The Fablmans.
Paul Dano et Michelle Williams entourant le jeune Steven Spielberg alias Sam dans The Fabelmans.

Paul Dano et Michelle Williams en parents du réalisateur

Retournant aux sources de sa vocation, Spielberg filme le petit garçon qu’il a été, à la fois terrifié et ébahi devant l’accident de train de Sous le plus grand chapiteau du monde de Cecil B DeMille. Pour s’approprier sa peur, il prend le contrôle de la caméra familiale et filme une reconstitution de l’accident avec son petit train électrique avant d’utiliser ses mains comme écran de fortune pour y voir s’animer l’image du projecteur.

Son désir de création évolue rapidement et on observe ensuite le jeune Sam (Gabriel LaBelle) réaliser ses premiers courts métrages où il transforme ses petites sœurs en momies et ses camarades scouts en cowboys… Montage rythmé, ellipses, jeux d’ombres et de lumières : Steven Spielberg rend hommage à l’artisanat cinématographique à travers sa propre réalisation, mais également en montrant les astuces DIY de l’adolescent qui troue sa pellicule pour simuler les coups de feu ou utilise un chariot pour faire un travelling.

Spielberg raconte Steven intime

« La famille et l’art, ça te déchirera en deux » déclare un certain grand-oncle Boris (Judd Hirsch), brièvement de passage dans la famille après le décès de sa sœur. Une phrase qui résume parfaitement le film, car la passion dévorante de Sam pour le cinéma va rapidement être confrontée à la dure réalité de l’effondrement du mariage de ses parents.

Dans une séquence de montage rappelant le Blow Out de Brian De Palma (grand ami du réalisateur) il découvre, imprimé sur la pellicule, la relation cachée entre sa mère et le meilleur ami de son père (Seth Rogen) et prend aussitôt conscience de l’importance des images qu’il fabrique. Le cinéma devient alors vecteur de vérité, mais aussi refuge thérapeutique et lorsque tombe finalement l’annonce du divorce, Sammy se dissocie du moment et s’imagine en train de filmer sa famille effondrée.

Avec The Fabelmans, Spielberg explore de manière compréhensive ses souvenirs familiaux et aborde sa relation complexe avec l’acte de faire des films. A 75 ans passés, le cinéaste démontre qu’il a gardé toute sa fraîcheur créatrice et offre une œuvre bouleversante et brillante jusque dans son dernier plan…

The Fabelmans de Steven Spielberg (E.-U., 2h31) avec Gabriel LaBelle, Paul Dano, Michelle Williams, Seth Rogen… Sortie le 22 février. Pour un tout autre point de vue, lire aussi la critique de Luc Hernandez.

Steven Spielberg chemise bariolée casquette sur le tournage de The Fabelmans au milieu des enfants.