Ça commençait pour­tant bien. « Bonnard, c’est bonheur » dira Marthe après avoir couché avec lui. Nous, notre bonheur, c’est de voir Cécile de France plus radieuse que jamais, toute belle, toute nue, plon­ger en amou­reuse dans la Seine et deve­nir sa muse (un rien mytho) dans le plus simple appa­reil.

Peindre ou faire l’amour ? Les deux, et Martin Provost réussi dans un premier temps à capter les rappro­che­ments des corps de ses deux comé­diens dans une passion braque. Chahu­tée de la loufoque­rie à la gravité soudaine, Cécile de France traverse le large prisme des émotions, jusqu’à termi­ner 30 ans plus tard en sorcière vieillie aux cheveux blancs.

Cécile de France et Stacey Martin, Marthe et Renée…

Bonnard Pierre et Marthe… et l’autre

C’est là que le bât blesse. A vouloir étendre son biopic jusqu’à la mort, Martin Provost va exagè­rer gros­siè­re­ment jusqu’au drame une des nombreuses liai­sons de passage du peintre (avec trio­lisme chic)… Stacey Martin a le même charisme de crevette que son person­nage (qui revient hanter le couple en fantôme), et une querelle de maîtresses hysté­riques en costumes trem­pés dans la Seine avec Anouk Grin­berg frise la miso­gy­nie. Pour le vaude­ville comme pour la poésie, on repas­sera.

A vouloir gros­sir hysté­rie et jalou­sie fémi­nines et plaquer des dialogues didac­tiques tota­le­ment arti­fi­ciels, Martin Provost rate la poésie braque de ce couple à part. Pous­sant sa caméra à l’épaule d’une pièce à l’autre sur une rengaine de violons stri­dents pour faire moderne, il n’a jamais les moyens de l’es­prit déca­dent et liber­taire dont il se prévaut. Dommage pour les comé­diens. Derrière ses binocles à fuir le regard des autres pour mieux les inté­grer dans sa toile, Vincent Macaigne avait su rester énig­ma­tique.

Bonnard Pierre et Marthe de Martin Provost (Fr, 2h02) avec Cécile de France, Vincent Macaigne, Stacey Martin, André Marcon (Claude Monet), Grégoire Leprince-Ringuet (Vuillard)… Sortie le 10 janvier.