Il y a un grand sujet (tiré du livre David Grann) et des grandes inten­tions qui ne font pas débat dans Killers of The Flower Moon : la spolia­tion du peuple des Osages par les mariages cupides et les meurtres géno­ci­daires de l’Amé­rique blanche pater­na­liste qui a construit l’ex­pan­sion de son capi­ta­lisme pétro­lier sur le sang indien. Ce qui vaut à Robert De Niro, gran­diose, son plus beau rôle d’or­dure de la famille depuis long­temps.

Robert De Niro en ordure gran­diose.

Ce qui nous vaut aussi un tout début splen­dide avec l’in­vo­ca­tion indienne resi­tuant les diffé­rentes tribus des Indiens d’Amé­rique. On se dit qu’a­vec Killers of the Flower Moon Martin Scor­sese va renouer avec l’ins­pi­ra­tion spiri­tuelle de Kundun ou Silence. Malheu­reu­se­ment, il n’en sera rien. Si le dernier quart d’heure en forme d’enter­tain­ment radio­pho­nique résume à merveille comment l’Amé­rique a recy­clé cette exter­mi­na­tion silen­cieuse (racon­tée par Marty en personne), ce n’est vrai­ment pas le cas des trois heures qui précèdent, aussi insis­tantes que le témoi­gnage d’Er­nest (Leonardo DiCa­prio dans le film), dont chaque scène semble n’exis­ter que pour nous démon­trer à chaque fois à quel point il est benêt.

Des expli­ca­tions aussi bêtes que le person­nage de Leonardo DiCa­prio

Leonardo DiCa­prio, déjà une belle tête de vainqueur à son maria­ge…

A partir de là, on a le senti­ment qu’Apple a signé un chèque en blanc de 200 millions d’eu­ros à Scor­sese pour qu’il lâche les chevaux, au sens propre comme au sens figuré. Pas une explo­sion qui ne manque dans Killers of the Flower Moon, voitures ruti­lantes, saloons tout neufs et 36 rôles secon­daires inutiles qui ne font que passer dans le plan (même le shérif qu’on voit déjà à peine a son adjoint juste le cul posé sur sa chaise)…

Une rue à perte de vue de Killers of the Flower Moon.

Mais surtout, chaque meurtre nous est expliqué par le menu et ré-expliqué trois fois (en annonce, en voix-off puis en flash­back), avant de nous être à nouveau rabâ­ché au procès final, au cas où une balle nous ait encore échap­pée… Effec­ti­ve­ment, ça peut durer long­temps… Même l’his­toire d’amour au coeur du récit entre Ernest et Molly (magni­fique Lily Glad­stone), finit gâchée par la démons­tra­tion perma­nente de la bêtise de l’un – sans cesse mani­pulé par son oncle – et la mala­die de l’autre, confi­née à jouer les madones souf­frantes bleuie dans son lit à force de piqûres d’in­su­line.

Malgré de beaux restes de Marty, ce qui se voulait une grande fresque histo­rique en forme de marche mortuaire se mue alors en chemin de croix pous­sif dans un faux rythme étal, dont les bonnes inten­tions font redon­dance à chaque plan. Dommage.

Killers of the Flower Moon de Martin Scor­sese (EU, 3h26) avec Leonardo DiCa­prio, Robert De Niro, Lily Glad­stone, Bren­dan Fraser… La critique de Julien Duc pour un avis diffé­rent.