Vous allez diri­ger le poème sympho­nique de Strauss, Une vie de héros. Diriez-vous que c’est une œuvre auto­bio­gra­phique ?

Niko­laj Szeps-Znai­der : Tout à fait ! C’est un titre assez ironique, comme souvent avec Strauss. Il sublime sa vie dans la musique, il était très secret. Il est à la fois extrê­me­ment pudique et très émotion­nel. Cette Vie de héros est vrai­ment un chef-d’œuvre. Strauss avait des méthodes de compo­si­tion nova­trices et contem­po­raines, tout en restant fidèle à l’idéal clas­sique. Il n’avait pas besoin de créer des ruptures sonores comme Stra­vinsky ou Schoen­berg. Il a méta­mor­phosé le système sympho­nique de l’in­té­rieur, sans en briser les lois. C’est assez unique.

Il l’a fait aussi à l’opéra. Vous montez Cosi fan tutte de Mozart à la fin de la saison. Vous pour­riez monter Le Cheva­lier à la rose un jour?

C’est mon grand rêve ! Il faut regrou­per des voix excep­tion­nelles, même pour les plus petits rôles, mais nous pour­rons y arri­ver un jour, j’es­pè­re… Chez Strauss, comme chez Mozart, il y a toujours une compo­si­tion d’émo­tions complexes à l’in­té­rieur de la simpli­cité la plus appa­rente. C’est pour ça qu’il sont si diffi­ciles à inter­pré­ter. Le Cheva­lier à la rose était la façon de Strauss de répondre aux Noces de Figaro.

Diriez-vous la même chose pour la sympho­nie de la 9e de Mahler que vous allez diri­ger en mars ?

Niko­laj Szeps-Znai­der : « Oui, mais avec la neuvième sympho­nie, il s’agit vrai­ment d’un point de rupture. S’il n’était pas mort aussi jeune, je pense que Mahler aurait fondé véri­ta­ble­ment un nouveau système. En revanche, il est toujours resté atta­ché à la tona­lité. La musique occi­den­tale ne sera plus du tout la même à partir du moment où elle quit­tera la musique tonale. De ce point de vue là, Mahler est le point limite de la sympho­nie clas­sique.”