Avant sa Palme d’Or pour Une affaire de famille, le réali­sa­teur Hiro­kazu Kore-Eda s’in­té­res­sait à l’his­toire d’une demi-sœur trou­vant peu à peu sa place dans une famille adop­tive. Un portrait à la façon d’un paysa­giste en état de grâce, à revoir ce week-end à sa juste valeur au Summer Camp du Zola, la plus belle program­ma­tion ciné­phile de l’été.

Jugé trop mièvre (à tort), Notre petite sœur de Hiro­kazu Kore-Eda avait été reçu assez froi­de­ment au festi­val de Cannes de 2015, au point d’en repar­tir bredouille.. Aussi mineur soit-il dans l’œuvre du cinéaste japo­nais – rien n’est moins sûr notam­ment lors d’une deuxième vision – il nous avait déçu en bien, comme disent les Suisses. En appa­rence, cette histoire de Suzu, demi-sœur de quatorze ans rejoi­gnant ses trois aînées dans la demeure fami­liale à la mort de leur père à toutes, est sans doute son film le plus clas­sique. Aucune effu­sion, happy end et zeste d’hu­mour à froid, les dialogues quoti­diens n’y dépassent jamais le frémis­se­ment du thé. Kore-Eda est au sommet d’un natu­ra­lisme étal, obser­vant l’ordre des saisons (le tour­nage s’est déroulé scru­pu­leu­se­ment sur un an dans une ville de bord de mer), et guet­tant l’adé­qua­tion de l’ordre fami­lial avec elles. Il expé­die la mort du père d’un plan sur une chemi­née partant en fumée comme si le drame et les problèmes ne sauraient avoir de place trop grande dans ce film d’une douceur infi­nie.

Foot­ball et sensua­lité

Notre petite soeur de Kore-Eda, à voir au Zola à Villeur­banne.

Il réus­sit une scène d’an­tho­lo­gie de balade à deux roues sous les ceri­siers en fleurs, pour voir sa Suzu renaître à la vie. Le premier plan remonte les jambes d’une des trois sœurs enla­cée dans son lit annonçant déjà un film on ne peut plus sensuel. Les séquences de foot­ball (Suzu tient la dragée haute aux garçons), de feu d’ar­ti­fice ou le travel­ling final montre que le clas­si­cisme de Kore-Eda sait se parer des plus beaux atours. Ce portrait de femmes entre elles à la distan­cia­tion obsti­née a parti­cu­liè­re­ment bien vieilli pour qui s’est appré­cié cet art japo­nais si parti­cu­lier du paysage. Un tableau de famille recom­po­sée comme une saison qui renaît à la vie.

Notre Petite Sœur de Hiro­kazu Kore-Eda (2015, Jap, 2h08) avec Karuka Ayase, Masami Naga­sawa, Suho Hirose, Ryo Kase, Kaho… Au cinéma Le Zola à Villeur­banne dans le cadre de son « Summer camp » vendredi 17 juillet à 18h et dimanche 19 juillet à 16h. Tout le programme << ici >>.