C’était déjà Noël à l’Auditorium samedi dernier. Acclamation immédiate et standing ovation partielle, amplement méritée, à la fin du King Arthur de Purcell dirigé par la maître anglais de cette musique qu’il serait temps d’anoblir : Paul McCreesh et ses Gabrieli Consort Players. Stature alerte, direction en totale complicité avec son orchestre, le chef se joint de temps en temps au choeur pour chanter une chanson de taverne avec lui.

Dommage qu’on n’ait pas pu trinquer avec eux d’une pinte de bière dans la salle. McCreesh a tout compris de cette musique qui respire le plaisir, de la nature, des amours et des jeux bien arrosés. Il fait vivre tout l’esprit de simplicité alerte de ce King Arthur avec une rare subtilité, jamais dans la facilité.

Une bonne bière pour trinquer au King Arthur de McCreesh

La longue suite orchestrale d’introduction annonce déjà Rameau le symphoniste et McCreesh la dirige comme tel, l’orchestre et le continuo font ressortir toute la noblesse de cette musique chatoyante et furtive, variant les climats jusqu’au fantastique. Car King Arthur est une pure fantaisie à la gloire de la « Vieille Angleterre », bien davantage qu’une adaptation du Roi Arthur et des Chevaliers de la table ronde. Une sorte d’opéra masqué à l’anglaise, en quatre actes furtifs et facétieux qui passent aussi vite que deux mi-temps de football pour un concert d’1h40.

Les airs du berger et de l’amant entonnés comme des chansons à refrain nous rappellent ce que Purcell doit à la pastorale, dont saura se souvenir Haendel après lui. Avec ses chaussettes vertes sous son costume gris, le Génie du froid d’Ashley Riches dans l’air le plus célèbre de la partition démontre une nouvelle fois le grand chef qu’est McCreesh. Plutôt que d’exacerber un martellato pour flatter le tube qu’il est devenu depuis, le maestro en fait un théâtre de pur bel canto faisant vibrer chaque sens du texte dans son interprétation musicale.

Paul McCreesh et sa bande au moment des saluts à l’Auditorium.

Plaisirs de la pastorale selon Purcell et Génie du froid d’anthologie

C’est d’une introduction ensommeillée que se réveille ce drôle de Génie en train de songer à la mort en gelant de froid. Son Let me freeze es un modèle de théâtralité soufflant littéralement le chaud et le froid sur un tempo véritablement baroque, moment de douce comédie noire et fantastique comme savait en produire l’esprit gothique de Purcell.

En fin de représentation, après les applaudissements nourris, en grand chef démocratique soudé à ses musiciens, McCreesh laisse la place en quittant la scène à ses Gabrieli Consort Players pour une dernière chaconne. La grande classe, et un maximum de plaisir.

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