Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais ce n’est pas l »indignation qui manque. Ni la contestation. Légitimes, bien entendu. L’injonction à être ceci ou ne plus être cela a envahi les programmes des salles de spectacle, comme les griefs et les susceptibilités, en oblitérant ou en méprisant tout autre façon d’être cela ou ceci. Quitte à faire fuir une bonne partie du public… Car figurez-vous que les places de spectacle sont payantes, et qu’il va falloir donner envie d’avoir envie, comme disait l’autre.

Il y a trois ans, un jeune auteur de théâtre, Hugues Duchêne, s’amusait avec jubilation sur la scène des Célestins de ce petit monde artistique qui cherche avant tout à « s’indigner, se faire entendre, prendre le micro », comme si c’était une fin en soi. Comme aujourd’hui certains prétendre censurer Sylvain Tesson, simplement parce qu’il a été nommé parrain du Printemps des poètes… On a l’engagement politique qu’on peut.

Heureusement, cette semaine, il reste Valère Novarina qui s’amuse en chantant des tics politiques et de l’écriture inclusive en inventant lui-même une langue du neutre basé sur les « u ». Ou Laurent Pelly qui reprend un de ses plus beaux spectacles, féministe en diable, dans lequel on voit une certaine Boulotte de la campagne déboulonner Barbe-Bleue à la sauce Offenbach.

Enfin, Yorgos Lanthimos a obtenu le Golden Globe de la meilleure comédie en offrant à Emma Stone son plus beau rôle. Celui d’une Bella Frankenstein qui va apprendre à disposer de son corps contre ces Pauvres créatures que sont les hommes dans une satire féministe et surréaliste réjouissante. Le film cartonne en ce moment à Lyon. Comme quoi, on peut faire des oeuvres manifestes en n’oubliant ni d’être inventif, ni d’être drôle. Courez-y. Vive la comédie !