Où est passé le public des films art et essai ? C’est ce que se demande le syndi­cat de la critique de cinéma, qui n’est pour­tant pas la dernière à les promou­voir… Son bilan est édifiant sur l’an­née écou­lée : si les films art et essai n’ont jamais autant trus­tés les sorties ciné (la pandé­mie calmant les ardeurs des gros budgets prêts à conqué­rir le monde entier) – envi­ron 41% des films en 2021 -, ils accusent pour­tant une baisse de fréquen­ta­tion sur la même année  de… 43% ! Compre­nez : alors qu’ils n’ont jamais eu autant d’écrans et aussi peu de concur­rence, les films art et essai n’ont jamais été aussi peu vus en salles, en tout cas depuis long­temps..

Cinéma d’au­teur mondia­lisé et film France Inter


Car contrai­re­ment à certains a priori, le public jeune, lui, censé vivre greffé à son smart­phone, est bien retourné en salles : en témoignent les succès, nombreux, de films comme Spider-Man No Way Home (7 millions d’en­trées, un vrai score d’avant-crises), Dune ((3 100 000), Kaame­lott de notre Alexandre Astier local(2 600 000),  ou encore l’Encanto de Disney (2 200 000) ou encore Sonic 2 (idem). Sans comp­ter de belles surprises du cinéma français comme Bac Nord (plus de 2 000 000) ou Boîte noire (à plus d’un millions et à la Une d’Exit en septembre 2021), films assez large­ment boudés par la critique. Car tout ce qui se passe comme la critique (pari­sienne) et l’an­cienne intel­li­gent­sia ciné­phile conti­nuait de promou­voir des films d’au­teur mondia­lisé dans son coin, alors que le public n’en peut plus (comme nous) : plans moyens, sujets sociaux, person­nages urbains, indé­ci­sion senti­men­tale et lacunes scéna­ris­tiques si possible avec des acteurs très “frais” (compre­nez pas très bons)… Bref, le fameux film “France Inter” !

L’art et essai n’est plus qu’à l’es­sai

En fait, c’est le baby boomer qui semble rester devant sa plate­forme – bien équipé de son home cinema –  plus que le geek qui a soif d’ima­gi­naire, et de films un tant soit peu enga­geants, si tant est qu’ils aient une origi­na­lité d’angle ou un peu d’ins­pi­ra­tion visuel­le… Les succès d’Aline de Valé­rie Lemer­cier ou plus récem­ment d’En Corps de Klapisch montre bien qu’un sujet origi­nal et posi­tif a plus de chances de trou­ver son public qu’un énième raba­chage auteu­riste. Bref, plutôt que de s’in­ter­ro­ger sur un public qui certes a sans doute toutes les raisons pour moins sortir qu’a­vant (Covid flip­pante, élec­tions dépri­mantes, guerre téta­ni­sante, et pouvoir d’achat en berne), il serait peut-être temps que le milieu du cinéma recon­si­dère enfin son offre, sans doute en distri­buant moins mais mieux… Sous peine de voir les salles conti­nuer de se vider.