Voici la critique que nous écrivions dans Exit Mag à la sortie du film de Dominik Moll : un « sommet de polar humaniste » et « d’ores et déjà un des grands films français de l’année ». 6 Césars plus tard, voilà qui n’a fait que se confirmer.
Depuis ses débuts et le désormais culte Harry, un ami qui vous veut du bien, Dominik Moll excelle dans une exploration singulière du cinéma de genre, jouant avec ses codes pour le tirer vers une forme de méditation existentielle. Dans ce nouveau polar inquiet et mélancolique tourné entre Isère et Savoie, un enquêteur de la PJ de Grenoble habité par sa charge tel un moine-soldat (l’excellent et trop rare Bastien Bouillon) doit résoudre le meurtre aussi brutal que tristement banal d’une jeune femme ordinaire, brûlée vive en plein jour. Point de départ d’un étrange récit qui semble tourner en rond, à l’image de ces tours de piste nocturnes que s’impose ce flic cycliste, mais qui dessine avec de subtiles variations une carte lucide d‘un certain machisme, à l’indifférence coupable.

Polar humaniste
Lointainement inspiré d’une affaire réelle, le film évacue les détails techniques du film-dossier au profit d’une vérité plus psychologique et secrète : « Tous les hommes ont tué Clara » conclut un héros accablé par la désinvolture des suspects potentiels, mais troublé aussi par son propre rapport à cette violence, évoluant lui-même dans un monde presque exclusivement masculin. Par la grâce d’une mise en scène épurée qui fuit les effets de manche et soigne ses cadres pour filmer à juste distance des scènes âpres aux dialogues ciselés, le film échappe au pamphlet dénonciateur pour se hisser à des sommets de polar humaniste. D’ores et déjà l’un des grands films français de cette année. A.L.
La Nuit du 12 de Dominik Moll (Fr, 1h55) avec Bastien Bouillon, Bouli Lanners, Théo Cholbi, Lula Cotton-Frappier… Sortie le 13 juillet.