Il nous a fallu nous y rendre quatre fois en vain avant qu’elle ne se décide à ouvrir… Mais la nouvelle expo­si­tion de la Biblio­thèque de la Part-Dieu sur la repré­sen­ta­tion du loin­tain, arrive avec brio, à allier la beauté de l’in­connu et l’émer­veille­ment que l’on retrouve de façon intrin­sèque dans la décou­verte de nouveaux pays et même dans l’ex­plo­ra­tion des cieux. Mais elle pose du même coup, un regard plus critique pour mettre en relief les rapports de force et de domi­na­tion qui se jouent dans les repré­sen­ta­tions euro­péennes du loin­tain. C’est au cours du XXème siècle grâce des auteurs comme Claude-Lévi-Strauss, Natha­lie Sarraute ou encore Jean-François Stas­zak, que l’on commence à ques­tion­ner la vision que l’on se fait de l’étran­ger ou de l’ailleurs.

Repré­sen­ter le loin­tain, près des stéréo­types

Jules Dumont, Voyage au Pôle Sud (1846). (photos BM Lyon)

Ces recherches permettent de comprendre que les repré­sen­ta­tions du « loin­tain  » sont en réalité des construc­tions occi­den­tales qui voient la réalité par un prisme réduc­teur qui n’est pas exempt de domi­na­tion et de colo­nia­lisme. Les repré­sen­ta­tions sont souvent stéréo­ty­pées et réduc­trices, elles ont notam­ment conduit à la créa­tion de clichés, qui ont la peau très dure. Le regard euro­péen est « occi­den­talo-centré  » – c’est bien le moins – il sert à nour­rir cette propre recherche d’exo­tisme et cette volonté d’éva­sion.

Indi­gènes repré­sen­tés nus

Pour illus­trer ces grands concepts, l’ex­po­si­tion aborde par exemple les indi­gènes aux XVe et XVIe siècles, qui sont toujours repré­sen­tés nus, avec des outils rudi­men­taires ce qui a large­ment contri­bué à véhi­cu­ler la figure du « sauvage » qu’elle soit bonne ou mauvaise. Ce genre de repré­sen­ta­tion a amené, quelques siècles plus tard, à des théo­ries qui sépare les hommes en diffé­rentes « races » débou­chant sur des théo­ries racia­listes, prônant l’homme blanc et civi­lisé supé­rieur aux « sauvages ». Une expo­si­tion pluri­dis­ci­pli­naire qui aborde des concepts fonda­men­taux néces­saires pour déco­der l’his­toire et ses repré­sen­ta­tions qui sont parve­nues jusqu’à nous. Elle permet de nous donner des clés de lecture fonda­men­tales dans diverses sciences humaines et sociales et de consom­mer moins naïve­ment certaines images. K. G.-C.

Vue des Cordillères par A. von Humboldt vers 1816 (Paris, N. Maze).