C’est à Lyon que Louis Garrel a choisi de situer son nouveau film, L’In­nocent. Drôle de polar tendre comme une comé­die fami­liale. De quoi faire évoluer l’image d’un acteur-réali­sa­teur passion­nant qui offre deux rôles magni­fiques à Anouk Grin­berg et Noémie Merlant, et est en passe de connaître son plus beau succès.

Ça vous surprend qu’on vous trouve drôle avec L’In­nocent ?

Louis Garrel : « J’ai présenté le film au festi­val de Monté­li­mar et quelqu’un m’a fait remarquer que j’avais joué dans beau­coup de films intel­lec­tuels, assez sombres, bref, que j’avais une image de raseur ! Je me suis dit « bon, ok, ça doit vrai­ment être l’image que je dégage ! »… Je pense que ça corres­pon­dait sûre­ment non pas à des films forcé­ment intel­lec­tuels, mais à mon image de jeune premier téné­breux que cher­chaient les réali­sa­teurs…

Il y a quelque chose de très enfan­tin dans votre film – pas d’in­fan­tile – dans la façon de croi­ser la comé­die fami­liale avec le genre du polar. On voit d’ailleurs une photo de person­nage enfant au début du film sur le tableau de bord de la voiture. C’est vous ?

Oui, c’est moi, bouffi et moche ! C’était un peu une façon d’ins­crire les origines auto­bio­gra­phiques du film autour du mariage de ma mère en prison. Mais ce n’était qu’un point de départ pour le film. Je n’ai d’ailleurs pas pu aller en prison assis­ter au mariage à l’époque, j’étais trop petit et les mineurs n’étaient pas admis. Avec Tanguy Viel au scéna­rio, on voulait vrai­ment faire un polar avec de vrais person­nages pris dans toutes sortes d’aven­tures, un film de fila­ture jusqu’à une vraie scène de casse, mais en désa­morçant le côté viri­liste du polar. En fait, je ne voulais ni tomber dans le pathé­tique des rapports mère-fils qui peuvent vite deve­nir lourds au cinéma, ni dans la testo­té­rone des polars habi­tuels. On a donc voulu écrire des person­nages suffi­sam­ment forts pour pouvoir les emme­ner dans des situa­tions rocam­bo­lesques, et que les deux s’équi­librent.

Un peu comme dans la comé­die italien­ne… d’où le choix du Vieux-Lyon pour le maga­sin de fleurs d’Anouk Grin­berg ?

Oui, je me souviens d’Une vie diffi­cile de Dino Risi qui se passe en pleine guerre mais dans lequel persiste toujours des moments de drôle­rie et de légè­reté. Non pas pour faire rire à tout prix, mais pour garder quelque chose de roma­nesque, un plai­sir du ciné­ma…

Anouk Grinberg et Louis Garrel dans le magasin de fleurs du Vieux-Lyon dans L'Innocent.
Anouk Grin­berg avec Louis Garrel acteur et réali­sa­teur dans le maga­sin de fleurs du Vieux-Lyon. (photos Emma­nuelle Firman)

Vous offrez aussi à vos deux actrices des rôles radieux…

Noémie (Merlant, ndlr) s’est vrai­ment décou­vert un pouvoir comique sur le tour­nage et on voyait moins Anouk Grin­berg au moment du tour­nage, elle avait été aussi beau­coup enfer­mée dans des rôles endo­lo­ries au théâtre. Je crois qu’elles étaient très heureuses ! Ce sont aussi des person­nages qui s’amusent à jouer en perma­nence, comme au théâtre.

Louis Garrel et Isabelle Huppert dans Les Fausses Confidences de Marivaux mis en scène par Luc Bondy.
Louis Garrel dans Les Fausses Confi­dences de Mari­vaux avec Isabelle Huppert, mise en scène de Luc Bondy. (@Pas­cal Victor/ArtComP­ress)

Juste­ment, je vous avais vu au théâtre des Céles­tins dans Les Fausses confi­dences avec Isabelle Huppert sous la direc­tion de Luc Bondy. Vous incar­nez Chéreau dans Les Aman­diers, le prochain film de Vale­ria Bruni-Tedes­chi. Comment l’un et l’autre vous ont-ils marqués ?

Chéreau nous fasci­nait en temps que jeunes acteurs évidem­ment, il déga­geait une telle inten­sité sur un plateau ! Mais je l’ai moins connu. Luc a été un ami, il était vrai­ment plein d’hu­mour et d’iro­nie tout en restant très intel­lec­tuel. C’est chez lui que j’ai rencon­tré Chéreau comme beau­coup de metteurs en scène de théâtre. Dans la vie, ils étaient un peu le jour et la nuit.

Vous pour­riez refaire du théâtre ou vous êtes désor­mais trop absorbé par le cinéma ?

J’ai vrai­ment fait ce métier au départ pour être acteur de théâtre. Mais j’avais énor­mé­ment le trac ! Un peu comme avant d’al­ler présen­ter le film en ouver­ture du festi­val Lumière, il paraît que c’est très grand ! (sourire) Aujourd’­hui effec­ti­ve­ment le cinéma m’ac­ca­pare (Louis Garrel sera aussi à l’af­fiche de L’En­vol, le nouveau film de Pietro Marcello, en janvier 2023, ndlr). En revanche, j’ai­me­rais bien un jour mettre en scène un opéra.

Lequel ?

Tosca ! C’est tragique… »

L’In­nocent de et avec Louis Garrel, actuel­le­ment en salles. Lire la critique du film.

Les Aman­diers de Vale­ria Bruni-Tedes­chi avec Louis Garrel en Chéreau. Sortie le 16 novembre. Lire la critique du film.

L’En­vol de Pietro Marcello avec Louis Garrel et Noémie Lvovsky. Sortie le 11 janvier 2023.

Louis Garrel sur le tournage de son film L'Innocent à Lyon.
Louis Garrel derrière la caméra de L’In­nocent.