1. Janvier : Othello par Siva­dier avec Adama Diop

Adama Diop le poind rageur bouche ouverte dans Othello vu par Sivadier.
Adama Diop en Othello rageur dans la mise en scène de Jean-François Siva­dier.

Jean-François Siva­dier fait un sort à la ques­tion (complexe) du racisme chez Shakes­peare dans un spec­tacle en forme de comé­die féroce qui fera date. A côté du Iago génial de Nico­las Bouchaud qu’on adore abhor­rer, Adama Diop campe un Othello d’an­tho­lo­gie rappe­lant qui tient le premier rôle dans la pièce. Inou­bliable.

2. Mars : Double Murder & Clowns de Hofesh Shech­ter

Clowns de Hofesh Shechter main revolver sur la tempe.
Quand Clowns de Hofesh Shech­ter mime la violence.

Le choré­graphe star d’En corps de Cédric Klapisch signe un double programme glaçant faisant la nique à la mort et à toute forme d’exé­cu­tion. Dans un trip combat­tif et elec­tro qui vire à la transe absurde, pour retrou­ver une huma­nité dans le geste de danser ensemble. Un choc.

3. Avril : Star­ma­nia de Berger et Plamon­don revu par Thomas Jolly

En ne jouant pratique­ment que sur la beauté à couper le souffle de ses lumières, un décor tour­nant et une idée de mise en scène par tableau, Thomas Jolly sert à merveille la comé­die musi­cale culte de Michel Berger et Luc Plamon­don en en retrou­vant la noir­ceur nihi­liste et l’écla­tant moder­nité musi­cale. Bonne nouvelle : vous allez pouvoir vous rattra­per à la LDLC Arena en octobre 2024.

4. Juin : Boys boys boys de Florence Foresti à Four­vière

Foresti costume noir décolleté Ralph Wenig
Florence Foresti par Ralph Wenig.

C’est la plus grande mais elle se fout de son image et ose tout. Foresti signe son spec­tacle le plus osé et le plus cru sur les rapports homme-femme et fait très mal aux bien-pensants, même quand ils se targuent d’être du bon côté de #MeToo. Elle est surtout toujours aussi drôle, fine obser­va­trice de nos moeurs en déliques­cence qui se trans­forment en clown digne de Char­lie Chaplin dans son petit désha­billé noir. 5 dates inou­bliables à guichet fermé, qu’elle a prolon­gées depuis à la LDLC Arena de l’OL Vallée. Chapeau bas.

5. Juin : Mylène Farmer, Never­more au Grou­pama Stadium

Rêver avec Mylène Farmer au Grou­pama Stadium.

On y allait sans a priori. On en est revenu les yeux étoi­lés par une star timide en totale commu­nion avec son public, toujours aussi bonne danseuse, mais osant la matu­rité à travers des chan­sons moins atten­dues et une véri­table inti­mité, seule devant le piano au milieu de la foule de 50 000 fans à chan­ter son amour du gothique. On a eu de la chance : elle a dû annu­ler ses concerts suivants au Stade de France pour cause d’émeutes, mais ce n’est que partie remise.

6. Juillet-août : Robert Guinan au musée des Beaux-Arts

Le portrait de Nelly Breda par Robert Guinan.

C’est la grande décou­verte expos de cette année à Lyon : l’Amé­rique des noirs et des lais­sés pour compte par le peintre chica­goan Robert Guinan, avec la chaleur des couleurs chatoyantes et des scènes d’in­té­rieur dessi­nées avec la moder­nité d’un Hopper. Le souci docu­men­taire en plus : Robert Guinan peignait celles et ceux qui étaient les siens, autour de lui, à commen­cer par son portrait le plus célèbre, celui de Nelly Breda.

7. Septembre : Keers­mae­ker toujours au-dessus avec Exit Above

Toute l’his­toire du blues et de la pop music en 1h30, à travers une nouvelle troupe de jeunes danseuses et danseurs issues du hip hop… Après avoir exploré Bach ou Biber, Anne Teresa de Keers­mae­ker se renou­velle en faisant chan­ter et jouer la musique live sur fond de La Tempête de Shakes­peare. Le choc de la dernière Bien­nale de la danse.

8. Octobre : La Femme sans ombre de Strauss à l’Opéra

Heureu­se­ment qu’il reste encore des spec­tacles aussi ambi­tieux à l’opéra, il n’est faut que pour ça ! Fémi­niste et fantas­tique, La Femme sans ombre de Richard Strauss était donnée pour la première fois à Lyon dans une orches­tra­tion compa­tible avec la fosse, et dans la produc­tion d’un dingue de théâtre qui sait animer un plateau pendant 3h, rend l’oeuvre lisible et ose la vidéo pour traduire les fantasmes de ce chef d’oeuvre maudit revenu à la vie artis­tique. Gran­diose.

9. Novembre : L’Art de la joie aux Céles­tins

Une metteuse en scène, Ambre Kahan, qui s’at­taque au roman fleuve de Goliarda Sapienza, véri­table traver­sée du siècle fémi­niste et roma­nesque. Le sang neuf inonde la scène des Céles­tins sans un temps mort et nous sidère. Bonne nouvelle : ce n’était que les deux premiers actes, vive­ment la suite !

10. Décembre : Grigory Soko­lov à l’Au­di­to­rium

Grigory Soko­lov quitte le plateau de l’Au­di­to­rium après le dernier salut.

Il n’y a plus de mots pour Grigory Soko­lov, impas­sible et géné­reux, soule­vant la foule de l’Au­di­to­rium pour 5 bis d’après concert, des danses de Rameau au clavier infini de Rach­ma­ni­nov. Aupa­ra­vant, il aura livré pendant deux heures des Bach et Mozart d’an­tho­lo­gie, alliance mira­cu­leuse d’un archi­tecte souve­rain au sommet de son art, avec la fraî­cheur de jeune fille d’une sensi­bi­lité qui trans­pa­raît à chaque note. Pas de plus belle façon de termi­ner l’an­née.