210 000 spec­ta­teurs dont 40% de renou­vel­le­ment du public, avant que les grèves de sala­riés ne compro­mettent les trois créa­tions du festi­val de l’Opéra de Lyon et son lance­ment de saison, la dyna­mique scène lyrique lyon­naise, mépri­sée dans ses finan­ce­ments par la Région comme la Ville (-500 000 euros chacun) se portait bien, merci. Pas du genre à se lais­ser inti­midé par la tempête, son nouveau direc­teur, Richard Brunel, annonce même vouloir conti­nuer d’en­tre­te­nir « le goût du risque » avec une « poli­tique artis­tique auda­cieuse« , marque de fabrique de l’ins­ti­tu­tion depuis l’ère de Serge Dorny.

Moins de Péri­style et pas d’opéra itiné­rant

Les baisses de subven­tions ont un coût. Richard Brunel a fait ses choix : suppres­sions du festi­val gratuit du Péri­style cet été sous les arcades, et de l’opéra itiné­rant – en tout cas pour cette nouvelle saison – soit les deux actions prin­ci­pales corres­pon­dants à la poli­tique cultu­relle muni­ci­pale, et donc à sa baisse de subsides. Les élus eux aussi doivent assu­mer leur part de respon­sa­bi­li­té…

Pour le reste, on se réjouit déjà de voir des oeuvres rares, fortes et variées : c’est le cas de La Femme sans ombre de Strauss, jamais montée à Lyon, ouvrant la saison sous la baguette du direc­teur musi­cal Daniele Rustioni, qui avait promis d’ou­vrir chaque saison en allant piocher dans le réper­toire alle­mand. Avant de reve­nir à toute la musique italienne qu’il aime et qu’il sert comme personne, avec deuex autres oeuvres tout aussi singu­lières : l’Adriana Lecou­vreur de Fran­cesco Cilea en version de concert, et La Fian­culla del West, le drôle de western de Giacomo Puccini (lui non plus jamais donné à Lyon), mise en scène par une jeune artiste polo­naise, Barbara Wyso­cka, en ouver­ture du festi­val 2024 inti­tulé « rebattre les cartes » dont on espère qu’il aura bien lieu…

La nouvelle produc­tion de Béatrice et Béné­dict de Berlioz, déjà montée (pendant le Covid), mais jamais montrée… (photos Blan­dine Soulage)

Deux autres oeuvres atypiques viennent contre­si­gner l’au­dace artis­tique de cette nouvelle saison : L’Af­faire Makro­pou­los de Jana­cek, déjà magni­fique­ment monté par Niko­laus Lehn­hoff à Lyon en 2005, qui fit ici l’objet d’une nouvelle produc­tion maison par Richard Brunel lui-même ; et l’inat­tendu Elias, superbe orato­rio roman­tique de Mendels­sohn, mis en scène par le parent terrible du théâtre espa­gnol, Calixto Bieito. Last but not least, la produc­tion du trop rare Béatrice et Béné­dict de Berlioz signée Damiano Michie­letto – créée en 2020 mais avor­tée pour cause de Covid – fait son grand retour sur la scène de l’Opéra de Lyon.

Daniele Rustioni au coeur de l’Opéra de Lyon (photo : MX)

Offen­bach et Tchai­kovski pour le grand spec­tacle clas­sique

Rassu­rons les spec­ta­teurs les plus sages : le pur plai­sir du diver­tis­se­ment lyrique est aussi à l’af­fiche, avec la reprise de la géniale produc­tion du Barbe-Bleue d’Of­fen­bach trous­sée par Laurent Pelly, et déjà deve­nue un clas­sique. La sensa­tion­nelle Héloïse Mas sera toujours de la partie. Tandis que Daniele Rustioni devrait faire des merveilles dans le plus roman­tique des opéras de Tchai­kovski, La Dame de pique, avec un nouveau venu à la mise en scène : le jeune artiste russe Timo­feï Koulia­bine, dont Richard Brunel avait déjà programmé en son temps à la Comé­die de valence un Tche­khov pas banal en langue des signes.

Seule créa­tion enfin, mondiale comme on dit : Otages d’après Nina Bouraoui, un texte que Richard Brunel avait déjà monté au théâtre et dont il a confié la musique à Sébas­tien Rivas, compo­si­teur et direc­teur du Grame (centre natio­nal de créa­tion musi­cale), lui aussi sévè­re­ment touché par les coupes de subven­tions muni­ci­pales. Cette nouvelle produc­tion sera présen­tée dans le cadre de la Bien­nale des musiques explo­ra­toires 2024. C’est ce qui s’ap­pelle se serrer les coudes.

Barbe-Bleue vue par Laurent Pelly. (photo Bertrand Stofleth)

Toute la saison lyrique 23–24 à l’Opéra de Lyon :

  • La Femme sans ombre de Richard Strauss. Direc­tion musi­cale mus Daniele Rustioni / mise en scène du Polo­nais Mariusz Trelinski. Du 17 au 31 octobre.
  • Adriana Lecou­vreur de Fran­cesco Cilea. Direc­tion musi­cale Daniele Rustioni (version de concert). 3 décembre 2023.
  • Elias de Felix Mendels­sohn. Direc­tion musi­cale Cons­tan­tin Trinks / mise en scène de Calixto Bieito. Du 17 décembre 2023 au 1er janvier 2024.
  • Barbe-Bleue de Jacques Offen­bach. Direc­tion musi­cale James Hendry / mise en scène Laurent Pelly. Du 24 janvier au 4 février 2024.

– Festi­val « Rebattre les cartes » :

La Fian­culla del West de Giacomo Puccini. Direc­tion musi­cale Daniele Rustioni / mise en scène Barbara Wyso­cka. Du 15 mars au 2 avril 2024.

La Dame de Pique de Piotr Illitch Tchaï­kovski. Direc­tion musi­cale Daniele Rustioni / mise en scène Timo­feï Koulia­bine. Du 16 mars au 3 avril 2024.

Otages de Sébas­tien Rivas, d’après Nina Bouraoui. Créa­tion mondiale. Direc­tion musi­cale Rut Sche­rei­ner / mise en scène Richard Brunel. Du 17 au 23 mars 2024.

  • Béatrice et Béné­dict de Hector Berlioz. Direc­tion musi­cale Johannes Debus / Mise en scène Damiano Michie­letto. Du 13 au 24 mai 2024.
  • Brun­di­bar de Hans Krasa. Reprise de la mise en scène de Jeanne Candel en 2016. Du 22 au 25 mai 2024.
  • L’Af­faire Makro­pou­los de Leos Jana­cek. Direc­tion musi­cale Alexan­der Joel / Mise en scène Richard Brunel. Du 14 au 24 juin 2024.

Grande soirée de présen­ta­tion de la saison tout public mercredi 10 mai à 20h (gratuit sur réser­va­tion).

Ouver­ture des abon­ne­ments jeudi 11 mai à 12h.

Ouver­ture de la billet­te­rie à l’unité vendredi 2 juin à 12h.